Lorsqu’elles signent des contrats avec les deux principaux avionneurs de la planète (Airbus et Boeing) les montants s’affichent habituellement en milliards de dollars. Depuis maintenant une dizaine d’années, les compagnies aériennes du Golfe arabo-persique sont les leaders incontestés du marché mondial de l’aviation civile, damnant ainsi le pion aux compagnies européennes et américaines.
Cette entrée fracassante dans la cour des grands s’est fait à mesure que l’explosion économique de cette région suscitait une demande croissante en biens de consommation en tout genre. Le Golfe est désormais un acteur incontournable de la mondialisation et un centre névralgique du monde de la finance. Il est donc normal qu’il devienne également une des places les plus courtisées de la planète. Cette croissance effrénée a donc dopé l’activité et le chiffre d’affaires des compagnies aériennes de la région. En guise de grandes sœurs qui se partagent la part du lion, on trouve les compagnies Qatar Airways et Emirates Airlines.
Cette croissance se retrouve d’abord dans les chiffres. Selon l’avionneur européen Airbus, « la planète aura besoin de 28 700 avions pour les 20 prochaines années » ! Trois raisons sont avancées pour expliquer ce chiffre déroutant qui renvoie à un marché potentiel de 3 500 milliards de dollars : l’accroissement de la population mondiale, la montée en puissance des pays émergents et de leur classe moyenne et la réhabilitation de la flotte de nombre de compagnies dont les avions prennent de l’âge. Et quand on pense à pays émergent, on pense naturellement à la Chine, l’Inde et le Brésil. Dorénavant, il faut désormais compter avec des pays tels que le Qatar, les Emirats Arabes Unis, le Koweït et l’Arabie Saoudite dont les chiffres de croissance économique dépassent désormais ceux de la Chine. Le Qatar par exemple va connaître une croissance de son PIB de 20% cette année ce qui a poussé le FMI à le considérer comme le pays le plus riche de la planète (en PIB par habitant)… Les pays du Golfe sont également dans une stratégie de diversification de leur économie pour réduire leur dépendance aux hydrocarbures. Parmi les axes prioritaires qui ont été adoptés par certains pays, on trouve la volonté de doper les industries du tourisme, de la culture et du savoir. Le Qatar et les Emirats (et notamment Dubaï) veulent ainsi devenir des acteurs majeurs du tourisme mondial et ont investi des dizaines de milliards de dollars dans ce secteur. Il faut donc que ces Etats se dotent de flottes aériennes imposantes pour accompagner ce surcroit d’activité. Dubaï, par exemple ambitionne de devenir une des futures plaques tournantes du trafic aérien. Doha, capitale du Qatar, n’est pas en reste : son aéroport qui sort de terre sera l’un des plus performants de la planète et l’un des plus coûteux.
Cette frénésie explique donc la boulimie qui s’empare de ces compagnies. Pas une année ne passe sans que l’un des salons majeurs du secteur de l’aviation civile ne voie une compagnie du Golfe signer un contrat record. En 2007, on avait vu les commandes record d’Airbus avec Emirates (plus de 20 milliards d’euros). La même année, c’est Qatar Airways qui passe commande pour 80 Airbus A 350 pour un montant de 16 milliards de dollars. C’est d’ailleurs ce contrat qui permettra à Airbus de lancer véritablement le programme de l’A 350… En 2011 les deux compagnies ont signé des contrats pour l’achat d’autres types d’avions pour plusieurs milliards d’euros. Il apparaît clairement que la région du Golfe s’érige en un acteur central du monde de l’aviation civile. Ce n’est donc pas un hasard s’il fut récemment question que le Qatar entre au capital d’EADS. Il va falloir se faire à cette idée : ces compagnies ont désormais la capacité de faire la pluie et le beau temps sur ce marché vital pour les industries aéronautiques occidentales…
ENNASRI Nabil, Doctorant.
Avec l’aimable autorisation de france-moyenorient.com