La direction pousse pour ouvrir sa première base opérationnelle en juin. Des lignes de Ryanair seront reprises. Mais le projet nécessite l’aval des syndicats sur la rémunération.
Changement de statut pour l’aéroport de Marseille. En construisant en 2006 un terminal « low cost » taillé sur mesure pour Ryanair, la plate-forme phocéenne faisait acte de félonie vis-à-vis d’Air France dans le paysage aéroportuaire français. Quatre ans plus tard, Marseille est appelée à devenir le laboratoire de la stratégie de la reconquête du réseau court-courrier d’Air France, ébranlé depuis des années par la déferlante des compagnies à bas coûts et du TGV.
C’est en effet à Marseille-Provence – mais pas dans le terminal low-cost – que la direction a décidé de lancer en juin son projet « bases province », qui consiste, par le biais d’une baisse de coûts de 15%, à développer fortement l’offre de vols, soutenue par des prix très agressifs. « Un plan offensif » qui, pour être mené à bien, a besoin d’un accord avec les syndicats, notamment des navigants, en particulier les pilotes. Ce qui est loin d’être gagné. En effet, pour augmenter le nombre d’heures de vols travaillées sans faire dériver le volume des rémunérations (les heures supplémentaires se déclenchent à partir de soixante heures de vols par mois chez les pilotes), la direction veut modifier, sur la base du volontariat, les règles de rémunération des navigants en passant d’un système de rémunération à l’heure de vol à un système de rémunération à la journée. L’idée est de travailler plus d’heures dans la journée sur un nombre de jours plus restreint, en contrepartie d’une hausse de salaire. Un système destiné aux personnels volontaires à être basés à Marseille, Bordeaux, Toulouse et Nice, les quatre aéroports ciblés par Air France.
Marseille sera donc la première. Cette escale étant considérée comme « chaude » socialement tout comme Toulouse, la direction estime que si le projet est accepté, il le sera aussi sur les trois autres aéroports. En outre, l’arrêt de la base marseillaise début janvier de Ryanair donne des opportunités en termes de réseau. Air France va reprendre les meilleures lignes délaissées par la low-cost irlandaise et en ouvrir de nouvelles. Les prix seront très agressifs avec des baisses prévues du prix moyen du coupon allant de 40% à 70%. « Dans certains cas, ils seront inférieurs à ceux d’Easyjet », indique une source informée.
Convaincre les salariés
Alors que des syndicats estiment impossible l’ouverture de la première base avant septembre, la direction pousse pour lancer le concept en juin. « Quitte à ne lancer la commercialisation qu’un mois avant le début des opérations avec une montée progressive du programme de vol prévu », précise-t-on. A part peut-être une ligne, les destinations d’Air France ne vont pas se télescoper avec celles de sa filiale « low cost » et charter Transavia, qui a déjà annoncé un renforcement de ses activités à Marseille. Sur les lignes loisirs à forte présence des tour-opérateurs, Air France laissera Transavia. Les trois autres bases seraient lancées d’ici à mars 2012. La question de Lyon, aujourd’hui le « hub » moyen-courrier de la filiale régionale Britair, se posera forcément. Celle d’Orly aussi. Pour l’heure, le projet bases ne porterait pas préjudice à Britair ni à l’autre filiale Regional. « Leur activité sera peu ou prou la même, explique une source informée. L’objectif est en effet qu’elles conservent le même nombre d’avions et plus ou moins le même nombre d’heures d’utilisation des appareils ».
Crainte d’une radicalisation
Mais la direction doit convaincre les syndicats et les salariés. Certains observateurs craignent une radicalisation des syndicats à l’approche des élections professionnelles en mars. Deux écoles s’affrontent pour savoir auprès de qui – des pilotes ou des personnels de cabine (PNC) -, il sera le plus compliqué d’obtenir le feu vert. Certains syndicalistes estiment que la question de « la rémunération des PNC fera capoter le projet ». Une chose est sûre, sans ce projet de croissance, Air France peut faire une croix définitive sur son activité court-courrier de point-à-point. Une menace pour l’emploi.
Source: latribune.fr