Tribunal correctionnel de Papeete
37 anciens PNC (hôtesse de l’air et steward) de la compagnie au tiare comparaissent devant le tribunal correctionnel de Papeete, Tahiti, pour répondre d’usage, transport et cession de stupéfiants. Le premier jour d’audience n’a pas permis de mettre à jour l’organisation d’un réseau au sein de la compagnie. Plusieurs prévenus estiment s’être fait berner par les enquêteurs.
C’est un gros gâchis
C’est en ces termes qu’un ancien personnel naviguant commercial (PNC) d’ATN résumait les cinq années de procédure qui ont abouti, lundi, à ce que 37 exsalariés de la compagnie au tiare prennent place sur le banc des prévenus du tribunal correctionnel. À la suite de deux lettres anonymes dénonçant plusieurs PNC pour consommation de drogues (de l’ice et de la cocaïne notamment) durant leurs escales à Los Angeles, le parquet de Papeete avait ouvert une enquête en 2005. Face aux gendarmes, les salariés mis en cause, dont la grande majorité a été licenciée de la compagnie, ont pour la plupart reconnu les faits de consommation. L’un d’entre eux a, également, avoué avoir ramené à Tahiti quelques petites quantités d’ice. À l’occasion de leurs escales dans la cité des anges, il était facile pour ces salariés particulièrement fêtards de se procurer les substances prohibées. “J. P”, le “dealer de la compagnie”, dixit une ex-hôtesse de l’air, occupait, en effet, les fonctions de voiturier dans l’hôtel qui accueillait les PNC, et celuici avait peu à peu noué des liens avec plusieurs membres de la compagnie. Pour la plupart des prévenus, les choses s’arrêtent pourtant là et ils ne se doutaient pas de l’ampleur que prendrait l’affaire. “C’est l’occasion qui faisait le larron (…) Ce n’était pas quelque chose qui était planifié”, a ainsi souligné devant la cour l’un des anciens stewards.
On a été jeté en pâture
“Nous sommes ici aujourd’hui car les gendarmes ont tourné l’affaire en nous disant qu’ils étaient là pour nous poser des questions parce qu’ils cherchaient des trafiquants. Ils nous ont dit : “Ça restera entre nous”. C’est pour cela que tout le monde a avoué, qu’on a tout dit (…) On a été jeté en pâture”, résume, amer, l’un des prévenus qui estime aujourd’hui avoir été trompé par les militaires. Un sentiment partagé par l’avocat de dix ex-PNC, Me James Lau : “Il y en a qui disent : “On a le sentiment de s’être fait avoir” (…) Si on avait pris les faits isolément, jamais on aurait poursuivi ces personnes- là”. Plusieurs accusés ont d’ailleurs réfuté leurs procès- verbaux d’audition, jugeant que leurs propos avaient été dénaturés. Pour un autre conseil de trois anciens salariés, Me Gilles Jourdainne, ce premier jour d’audience donne “un peu l’impression que la montagne accouche d’une souris”. “C’est un dossier qui a fait l’objet d’une enquête assez longue (…) On arrive aujourd’hui (…) à s’apercevoir que pour certains prévenus, on ne reproche que des faits véritablement de consommation”, ajoute-t-il.
J’avais avoué. Cela suffisait
Mais, la prise de drogue n’est pour le moins pas compatible avec la fonction de PNC, ceux-ci ayant notamment la responsabilité de la sécurité à bord des appareils. La réglementation internationale interdit d’ailleurs toute consommation de produits illicites pour les métiers de l’exploitation aérienne. Pour autant, la question de savoir s’ils étaient sous l’effet de substances prohibées aumoment des vols n’a pas été abordée lors de cette première journée d’audience. “On était responsable de la sécurité, on ne se mettait pas en l’air une heure avant d’embarquer. On était tous des bons PNC”, affirmait l’un d’entre eux dans la salle des pas perdus du tribunal avant d’ajouter : “Ces trois années ont été très dures. Certains d’entre nous n’ont pas rebondi”. L’une des prévenues, qui avait refusé un test capillaire lors de l’enquête, analyse destinée à déterminer le type de drogues consommées, a pour sa part justifié son attitude en expliquant avoir “déjà été assez humiliée”. “J’avais avoué. Cela suffisait”. Aujourd’hui, le procès de 37 ex- PNC reprend avec les réquisitions du procureur, suivies des plaidoiries des avocats. Le jugement est attendu demain.
Source: la DEPECHE de Tahiti