Les collectivités locales de Corrèze, de la Haute-Vienne et de la Dordogne doivent certainement regretter amèrement de ne pas avoir créé le tout premier aéroport interrégional français à la fin des années 60. De par son implantation, il aurait desservi à la fois Limoges, Brive et Périgueux.
Ce projet définitivement enterré au moment de la création de l’aéroport de Limoges-Bellegarde au début des années 70 aurait, en effet, évité les doublons de desserte découlant de la mise en service du nouvel aéroport de Brive-Vallée de la Dordogne inauguré le 15 juin 2010.
Convention vacillante
En dépit de l’existence d’un protocole de bonne conduite conclu entre les deux aéroports limousins le 3 mars 2011, ce pacte de non agression a volé en éclats suite à la décision prise par Ryanair d’ouvrir la liaison saisonnière Brive-Londres-Stansted à partir d’avril 2014. Déjà présente sur la plateforme corrézienne, la compagnie low cost irlandaise a, en effet, privilégié la desserte de la capitale britannique au détriment de la liaison existante sur Maastricht à cette échéance.
Cette ouverture ne susciterait aucune opposition si elle ne venait concurrencer directement celle exploitée toute l’année par la même compagnie au départ de Limoges-Bellegarde. Pourtant, Jean-Louis Nesti, Président de la CCI de la Corrèze et Président du Syndicat Mixte gérant l’aéroport se veut apaisant en indiquant que “ce ne sont pas du tout les mêmes zones de chalandise qui sont visées, des études ayant montré que les passagers arrivant à Brive-Vallée de la Dordogne se rendent en Corrèze, Dordogne et en Périgord Noir ou visitent les grands sites de Midi-Pyrénées dont Rocamadour”.
Rupture de confiance
Dans la capitale régionale du Limousin, Jean-Pierre Limousin, Président de la CCI de Limoges et de la Haute-Vienne, gestionnaire de l’aéroport de Limoges-Bellegarde, ne l’entend pas du tout de cette oreille. “Cette annonce d’ouverture constitue une rupture de confiance qui nous unissait. La convention précisait bien dans son article 2, au titre des engagements réciproques, que les aéroports s’engagent à ne pas négocier avec les compagnies desservant déjà l’autre plateforme pour des lignes nouvelles sauf accord de l’aéroport desservi par la compagnie. Or, en l’occurrence, nous avons été mis devant le fait accompli”.
Le coup est d’autant plus rude pour l’aéroport de Limoges que cette ligne sur Londres-Stansted est la plus importante de son réseau avec 94 000 passagers par an. Pourtant, à y regarder de plus près, les conséquences ne pourraient pas être si dommageables que ça. Jean-Louis Nesti évoque, en effet, “un trafic de 10 à 12.000 passagers par an sur Brive-Londres-Stansted, là où Ryanair en prévoit 17.000 de son côté” et ça “sans que cela coûte un centime d’euro de plus aux collectivités l’année prochaine”.
En fait, ce qui chagrine les dirigeants limougeauds, c’est que l’aéroport de Brive se serve de la future liaison sur Londres, l’une des plus prometteuses en terme de potentiel de trafic immédiat, pour réaliser ses objectifs de fréquentation. Pour l’heure et avec un trafic annuel de 60.000 passagers cette année, l’aéroport est en retard sur son plan de marche qui en prévoyait 150.000 à horizon de dix ans.
Une réconciliation possible ?
Si les positions des uns et des autres semblent irréconciliables pour l’heure, cette affaire pourrait servir de détonateur à une évolution de l’offre aérienne au départ du Limousin. Les deux aéroports ont tout intérêt à collaborer pour conserver leurs liaisons d’aménagement du territoire. La plus symbolique est assurément celle reliant Limoges au hub de Lyon.
Sa pérennité a été menacée ce mois-ci, Hop! ayant envisagé de suspendre son exploitation pour cause de déficit chronique. Il y aurait donc du sens pour que l’un des souhaits de la plus grande ville de Corrèze d’être reliée, à son tour, à Lyon soit exaucé au travers de la mise en place d’une liaison Brive-Lyon via Limoges.
Avec l’aimable autorisation de Challenges.fr