Le monde de l’aviation civile française est en deuil. Un drame survenu ce week-end dans les Pyrénées ariégeoises a coûté la vie à quatre jeunes passionnés : un instructeur et trois élèves de l’École nationale de l’aviation civile (ENAC) de Toulouse. Le crash qui a frappé l’ENAC, survenu dimanche 7 décembre en fin d’après-midi, a profondément ému la communauté aéronautique, qui pleure la perte de ces talents prometteurs.
Les circonstances du crash : un vol de loisir qui tourne au drame
L’appareil impliqué, un monomoteur Robin DR400-180 de quatre places, avait décollé en début d’après-midi de l’aérodrome de Saint-Girons-Antichan, dans l’Ariège, pour un vol de loisir d’une durée prévue de 20 à 30 minutes. À bord : un instructeur pilote de 25 ans, affilié à l’aéroclub local et à l’ENAC, ainsi que trois élèves âgés de 18, 21 et 21 ans. Parmi eux, un jeune homme déjà breveté pilote, une jeune femme élève pilote, et un autre étudiant en formation initiale.
Vers 18 heures, un appel d’urgence est émis par l’équipage, alertant le Centre de coordination et de sauvetage aéronautique (CCSA) de Lyon Mont Verdun. L’inquiétude grandit lorsque l’avion ne regagne pas son point de départ à l’heure prévue, vers 17h40. Deux hélicoptères – l’un de la gendarmerie, l’autre de la Sécurité Civile – sont immédiatement mobilisés pour des recherches dans une zone montagneuse difficile d’accès, près de l’étang d’Eychelle à Bethmale, à proximité de la frontière espagnole.
L’épave est localisée deux heures plus tard, à environ 2 000 mètres d’altitude, dans une vallée enneigée et escarpée, inaccessible par voie terrestre. Les secouristes héliportés, dont des équipes de la Sécurité Civile, n’ont pu que constater le décès des quatre occupants sur place. L’avion, décrit comme « disloqué » par les premiers éléments de l’enquête, gisait dans un relief hostile, rendant les opérations de récupération complexes. La météo était pourtant clémente ce jour-là, sans visibilité réduite ni conditions extrêmes signalées.
Jacques Danti, président de l’aéroclub de Saint-Girons, a exprimé son désarroi auprès de l’AFP :
La météo était bonne, c’était un vol de loisirs de 20 à 30 minutes. On ne sait pas ce qui s’est passé, on est dévasté. L’avion était en bon état et passait régulièrement par l’atelier agréé de l’aérodrome.
Les victimes : des jeunes talents de l’aviation civile
Les quatre victimes de ce crash étaient toutes liées à l’ENAC, prestigieuse école toulousaine formant les futurs pilotes, contrôleurs aériens et techniciens de l’aviation.
- L’instructeur : Âgé de 25 ans, il était pilote instructeur à l’aéroclub de Saint-Girons et intervenait également à l’ENAC en tant qu’instructeur théorique. Passionné et expérimenté, il encadrait les jeunes recrues avec dévouement.
- Le pilote breveté de 21 ans : Élève à l’ENAC depuis mars dernier, il suivait une formation en Gestion de la sécurité et exploitation aéronautique, un cursus de trois ans menant à des postes à la Direction générale de l’aviation civile (DGAC).
- La jeune femme de 21 ans : Élève pilote, arrivée à l’école en mars 2025, elle incarnait la nouvelle génération féminine dans un secteur traditionnellement masculin.
- Le jeune homme de 18 ans : Plus jeune du groupe, il était en début de formation à l’ENAC, avec déjà une passion affirmée pour le vol.
Ces profils, tous issus de filières sélectives (Maths Sup – Maths Spé, concours d’entrée rigoureux, visite médicale stricte), soulignent la tragédie : quatre vies fauchées au seuil de carrières brillantes. Comme l’a rappelé Olivier Chansou, directeur général de l’ENAC, dans un entretien à La Dépêche :
Quatre vies fauchées d’un coup, c’est un drame absolu. Ces jeunes étaient expérimentés et passionnés.
Réactions : un choc immense pour l’ENAC et la communauté aéronautique
L’annonce du crash a submergé l’ENAC de « profonde émotion », selon un communiqué officiel publié lundi matin. L’école a immédiatement activé une cellule psychologique et d’écoute pour soutenir élèves, personnel et familles. Une minute de silence a été observée ce mardi 9 décembre à midi dans la cour principale de l’établissement toulousain, en hommage aux disparus. Une cérémonie plus formelle est prévue dans les prochains jours.
Le ministre des Transports, Philippe Tabarot, a exprimé sa « profonde tristesse » dans un message poignant : « Ces quatre jeunes passionnés incarnaient l’avenir de notre aviation. Depuis hier soir, c’est toute la famille de l’aéronautique qui est en deuil. » Il a adressé ses condoléances aux familles et à l’ENAC, tout en annonçant la mobilisation des services de l’État pour éclaircir les circonstances.
Sur les réseaux sociaux, les hommages affluent. Des pilotes retraités, comme Bernard Farre, évoquent le « chagrin des parents » face à ces élèves ayant « réussi le concours de l’ENAC » avant même la fin de leur formation. Nicolas Tenoux, ambassadeur de la Fondation ENAC, cite :
Un pilote ne meurt jamais, il s’envole juste et ne revient pas. » L’aéroclub de Saint-Girons, lui, parle d’un « drame absolu » qui laisse le club « dévasté ».
Enquête en cours : les mystères d’un accident inexpliqué
Suite à ce crash d’élèves de l’ENAC une enquête judiciaire a été ouverte sous l’autorité du procureur de la République de Foix pour déterminer les causes exactes du crash. Confiée au Bureau d’enquêtes et d’analyses pour la sécurité de l’aviation civile (BEA), elle portera sur les facteurs techniques (état de l’appareil, maintenance), humains (fatigue, erreur de pilotage) et environnementaux (turbulences locales, relief). L’appel d’urgence émis suggère un problème survenu en vol, mais les boîtes noires de ce type d’avion léger ne sont pas systématiques.
Le BEA, assisté de la gendarmerie des transports aériens, devrait analyser l’épave une fois récupérée. Pour l’heure, aucune piste n’est privilégiée, et les premières constatations écartent un sabotage ou une défaillance majeure connue de l’appareil.
Un rappel tragique des risques de l’aviation légère
Ce crash ajoute quatre victimes dans des accidents d’avions de tourisme en France cette année, soulignant les dangers persistants de l’aviation générale malgré les avancées technologiques. Les Pyrénées, avec leur relief accidenté, sont un théâtre récurrent de tels drames. L’ENAC, qui forme plus de 1 000 étudiants par an, réaffirme son engagement pour la sécurité, mais ce week-end funeste laisse un vide immense.
En attendant les conclusions de l’enquête, la communauté aéronautique se recueille. Ces quatre âmes, parties trop tôt dans les cieux qu’elles aimaient tant, resteront gravées dans les mémoires comme des symboles de passion et de sacrifice. Nos pensées accompagnent les familles, les collègues et tous ceux touchés par cette perte irréparable. Que le vent les porte en paix.
